C'était un printemps comme les autres pour la plupart des loups, et pourtant, pour deux d'entre eux, il était synonyme de fierté. En cette saison qui annonçait la venue prochaine de l'été, quatre louveteaux était venus au mondes. Un mâle, trois femelles. Ce mâle, c'était Srell. Cette fratrie était née au cœur d'une petite meute un peu à l'écart, presque inconnue. Cette meute, ce n'était pas une des principales qui peuplent actuellement les terres lupines, non. Quoiqu'il en soit, les deux géniteurs de cette portée en étaient les dominants.

 Les mois passèrent et le père de Srell appris à ce dernier tous les rudiments du combat, de la chasse, ainsi que du poste de dominant. C'était en effet lui qui devait prendre la suite de son père. La vie semblait magnifique pour cette famille, cette meute, malheureusement, avant la première année de la fratrie, la dominante décéda.

 Un an plus tard, Srell fit la rencontre d'un louveteaux d'environ six mois. Celui-ci se prénommait Houn. Plein de bonnes intentions, notre loup en fit son apprentis et lui appris les enseignements qu'il avait reçu de son père. Environ six mois plus tard, Houn intégra la meute.

 Quelques autres mois passèrent encore, jusqu'au jour où le père de Srell rendit l'âme. Dans la tristesse de la perte, Srell fut nommé dominant, et il offrit à Houn, qui était devenu son meilleur ami, le poste de bras-droit.

 La vie fut parfaite durant près d'un an. Malgré tout, Srell ne cessait de se remettre en question, il avait toujours peur de n'être à la hauteur de son père. Puis, le drame arriva.

 Ils étaient trois ce jour là. Srell, Houn et un membre de la meute, Okawa. Ils étaient partis chasser, simplement.
"Srell ?
- Oui ?"
Okawa marqua une pose avant de continuer :
"Tu n'as pas l'impression parfois que ton père était... Mieux ?"
Srell et Houn regardèrent le dernier loup comme s'il venait de tuer quelqu'un. L'un parce qu'il ne supportait pas qu'on le compare à son père, l'autre parce qu'il savait très bien que son ami allait réagir de manière disproportionné.
"C'est vrai, continua Okawa en voyant qu'il avait atteint sa cible, ton père était quelqu'un de génial !
- Silence ! hurla Srell, soudainement pris d'un accès de rage.
- Arrête, Oka'... murmura Houn.
- Je ne dis que la vérité."
Le coup de patte partit immédiatement. Un coup de patte puissant qui mit Okawa à terre.
"Srell ! cria Houn en s'interposant entre les deux loups.
- Ton père ne frappait personne, au moins !
- La ferme !"
Srell redonna un coup, plus fort encore, puis encore un. Personne n'avait jamais comparé les capacité à dominer de l'ancien dominant et du nouveau. Srell n'aurait pas supporté. Justement. Il ne supportait pas. Le cri de Houn ne changea rien. Pour le faire taire, Srell avait frappé. Trop fort. Okawa ne bougeait plus. Et si Srell éclata en sanglot, cela ne changeait en rien le regard entre l'effroi et le dégoût que lui lançait son ami.
"Ne dis rien... Ne dis rien, je t'en supplie..."

 Bien sûr, Houn n'avait rien promis, s’enfuyant simplement. Srell avait séché ses larmes et était retourner au camp où il appris que Houn venait de passer pour annoncer sa démission. A priori, il n'avait pas parlé de la mort d'Okawa. Alors, pour se protéger, le dominant annonça qu'il savait pourquoi. Il disait qu'il savait pour Oka'.

"C'est lui... C'est Houn..."

Il éclata en sanglot, moins pour la mort d'un membre de sa meute que pour lui même, pour l'horreur qu'il s'inspirait. Il se faisait souffrir, il se dégouttait. Plus tard, il le retrouva, Houn. Aidé de sa meute qui l'avait cru et qui avait soif de vengeance, il le tua, Houn. Il se souvient du regard de sa sœur, Setenn qu'elle s'appelait. Il l'avait épargnée, il l'avait simplement assommée. "Je suis désolé" avait-il soufflé, dans un murmure faible, si faible...

Il avait dissous la meute, sans explication. Il avait pensé plusieurs fois en finir avec sa vie, il se détestait, il se dégouttait, il hurlait, seul dans le noir, il pleurait.

Puis il avait su. Il devait la retrouver. Setenn. Elle voulait sûrement se venger. Lui, il voulait s'expliquer, s'excuser, et si elle devenait trop dangereuse, la tuer. Seulement après, il serait libéré. C'était sa seule chance, pensait-il. Le seul espoir auquel se raccrocher maintenant.

Si encore il restait un espoir.
Un seul ultime espoir.

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