"Qu'est-ce que... C'est flou... Ça bouge... On dirait... Enfin... Peut-être... Je ne sais pas... On dirait que... Ça se calme... Enfin je crois..."Soleil de plomb. Quelques nuages solitaires, blancs comme neige.
"Qu'est-ce que... Qu'est-ce que je fait ici ?"C'était une prairie. Je me souviens parfaitement. Il y avait pas mal de fleurs au milieu de l'herbe verdoyante. J'y serait bien restée des heures... Si seulement j'avais su ce que je faisais ici. Je ne me souvenais pas être venue dans le coin, encore moins m'y être endormie. Alors pourquoi m'y réveillais-je avec un affreux mal de crâne ? Je m'étais levée, je sais, je me souviens. J'avais suivis la rivière parce que je n'avais nulle part d'autre où aller. Combien de temps avais-je bien pu marcher ? Je ne sais plus, je ne sais pas. Il y a simplement ce moment où je me suis arrêtée parce que c'était impossible. Dans mes pensées, dans mes souvenirs, je le voyais. Ou peut-être justement ne le voyais-je plus. Qu'importe, je savais, et j'aurais sûrement voulu ne jamais le savoir. Houn. Mon frère. Il était partit. Il avait rejoint le peuple des étoiles. Il brillait maintenant parmi elle. Houn. Comment ? Pourquoi ? Je ne savais pas. Seule cette pensée était sûre. Il n'était plus de ce monde.
Je me souviens avoir hurlé. Je me souviens avoir courut, sans aucune raison, sans savoir où j'allais. Je fermais les yeux pour ne plus voir la réalité. Mais à force d'utiliser mes forces à ne plus croire, je m'étais écroulée et ce à quoi je tentais d'échapper m'avait rattrapée. J'avais pleuré, beaucoup, longtemps. Je m'étais rendormie, épuisée.
A mon réveil, j'allais un peu mieux. Au moins, je ne pleurais plus. Je voulais recoller les morceaux de mon être. Alors, à voix haute, j’entamai :
"Setenn. Louve solitaire. Deux ans. Née au printemps. Parents solitaires. Frère..."
J'inspirai un grand coup pour ne pas me laisser aller.
"...Partit. Son nom ? Houn."
Au moins, j'avais recollé les morceaux. Voilà. Je n'avais plus qu'à rentrer et pleurer mon frère avec mes parents...
Non.
Parce que je ne savais pas tout. Je savais quatre choses. Houn était mort. Je ne savais pas comment j'étais arrivée dans cette plaine. J'avais à présent une cicatrice derrière l'oreille.
J'étais avec Houn au moment de sa mort.
Je ne me souvenais de rien, je savais juste cela. J'avais
tout oublié mais j'avais ce sentiments étrange et persistant qui me confirmais que j'étais avec lui lorsqu'il avait rendu son dernier souffle.
Je devais savoir ce qu'il s'était passé, je devais me souvenir. Comment pouvais-je avoir
oublié ? Les remords me grignotaient lentement l'estomac et le cœur comme un douloureux poison. Alors, je couru. Je ne m'arrêtai pas avant de retrouver une route connue. Seulement là, je pris conscience en stoppant ma course que ma bouche était pâteuse. Alors, je bus. Et sans le vouloir, je me vis dans l'eau de la rivière que j'avais suivie. Pelage terne et yeux sombres,
que deviendrais-je sans toi, Houn ?J'avais finis par apprendre la nouvelle à mes parents. Je ne leur avais pas parler de ma perte de mémoire, laissant le paysage flou. J'avais cherché dans mes souvenirs, fouillé, sans résultat. Alors, j'étais revenue là où je m'étais éveillée, maintenant deux jours plus tôt. J'avais découvert une chose que je n'avais pas vue avant. Des tâches rouges. Sang. C'est ici que mon cerveau avait fait ses premiers remous.
Il est étendu sur le sol. Le reste est flou, seul lui est là, blessé, sans vie. Son pelage souillé du même sang que celui qui tâche le sol.C'est ainsi que j'avais compris. Deux choses. Premièrement, Houn n'étais pas mort d'un accident. On l'avait tué. Deuxièmement, si je voulais découvrir la vérité, le pourquoi, et le comment, je devais chercher. Cela prendrait du temps. Beaucoup de temps. Je savais. Mais je
devais le faire.
Alors, j'ai cherché. Les nouveaux paysages et les nouvelles rencontre avaient tendance à animer ma mémoire. Ainsi, je compris que j'avais oublié du même temps beaucoup de choses que Houn m'avait dites. Cela n'arrangeait certainement pas mes recherches mais j'allais recoller toutes les pièces de ma mémoire. Et savoir. Je me souvenais maintenant qu'il m'avait dit qu'il était entré dans une sorte de petite meute indépendante, comportant vraiment peu de loup. Je crois qu'il avait finit par la quitter... Je ne savais si cela avait un rapport mais je gardais l'information dans ma tête, précieusement. Mais la phrase dont je m'étais souvenue et que je connaissais maintenant par cœur n'avait rien à voir avec toute cette histoire.
"Tu sais Set', si un jour nos chemins se séparaient, je continuerais toujours à penser à toi, où que je sois. Et j'ordonnerais aux étoiles de veiller sur toi."